[HUMANITAIRE] Pour une solidarité locale et participative – Part 2

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Les sites de crowdfunding solidaires se multiplient et les projets qu’ils proposent aussi

Le crowdfunding existait déjà avant que le terme n’existe.  Au sens strict, le financement par la foule est une pratique millénaire. La sédentarisation des premières sociétés en Anatolie, neuf mille ans avant notre ère,  a permis le développement d’un nouveau type d’échanges, jusque-là uniquement interpersonnels,  basé sur des contributions individuelles et des profits collectifs. Il s’agissait alors d’assurer la défense de la communauté par des mercenaires ou d’attirer les faveurs d’un dieu au moyen d’offrandes. Depuis, la nature des projets financés selon ce principe a changé mais pas leur finalité.

Les organisations humanitaires d’aujourd’hui, confessionnelles ou non, perpétuent certaines traditions héritées des monothéismes. Le don d’argent est la forme désacralisée de l’aumône chez les Chrétiens, de la Tzedaqa chez les Juifs, de la Zakât chez les Musulmans. Le financement par la foule est un mécanisme institutionnalisé depuis toujours mais ce n’est que récemment qu’il a pris une ampleur telle que les États et les banques s’y intéressent. L’enjeu est évidemment financier mais aussi – et surtout – sociétal.

En permettant à chacun de choisir un projet et d’y contribuer, le crowdfunding solidaire fait participer les donateurs à un processus décisionnel dont ils étaient exclus. La décision d’aider ne relève plus seulement des instances dirigeantes des organisations humanitaires ou des bailleurs de fonds mais, de plus en plus, des donateurs : une génération communiquant en réseau, s’informant en temps réel et consommant en ligne qui ne satisfait plus du simple rôle de financeur.

Nous éprouvons les mêmes besoins et les mêmes aspirations que nos ancêtres. Mais contrairement à eux, nous disposons de technologies qui nous permettent de les assouvir d’innombrables manières. Sur le marché du don, la profusion de l’offre a de quoi déconcerter. Les sites de crowdfunding solidaires se multiplient et les projets qu’ils proposent aussi. On pourrait catégoriser les acteurs du crowdfunding solidaire selon leurs statuts – associations, entreprises, organismes publics  – mais on ne ferait qu’entretenir la confusion tant leurs fonctionnements et leurs visions diffèrent. On le fera donc selon la nature de leurs projets : c’est là ce qui intéresse les donateurs.

 Il y a les plateformes généralistes que tout le monde connaît, comme Kisskissbankbank, où l’on trouve de tout : voyages étudiants, concerts caritatifs, documentaires… Des projets à vocation solidaire plutôt que solidaires. Il y a les champions du « charity business », comme Globalgiving, où l’on choisit le lieu d’intervention et la cause qu’on veut défendre : protection animale, promotion de la démocratie, assistance humanitaire… Il s’agit essentiellement de projets portés par des organisations anglo-saxonnes. Il y a les plateformes individualisées, plus rares, comme Watsi qui permet d’offrir un traitement médical à une personne malade. Enfin, il y a les plateformes qui ne sont pas que des plateformes car elles participent aux projets qu’elles soutiennent, comme MyLocal Project qui prône une approche locale de la solidarité.

C’est au donateur de choisir le projet qui lui plaît ou le projet qui lui ressemble. Mais plutôt que de se laisser séduire par un discours ou un design aguicheur, qu’il s’interroge d’abord sur ses motivations personnelles et sur le monde qu’il veut léguer à ses enfants. Et qu’il redonne ainsi du sens à l’acte de donner.

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À propos de l’auteur

“Après deux ans de bénévolat dans l’action sociale à Paris, j’ai orienté mes études vers la solidarité internationale. J’ai travaillé en tant que logisticien et administrateur au sein d’ONG françaises, sur des projets d’urgence humanitaire dans plusieurs pays, notamment la République Démocratique du Congo, Haïti, le Pakistan et le Soudan du Sud. C’est au cours de mes missions que j’ai pris pleinement conscience de l’importance de l’aide au développement. La transition d’une situation de dépendance des populations sinistrées à une autonomie retrouvée est au cœur de l’action humanitaire. C’est dans cette continuité d’action que j’ai cofondé en 2013 l’association MyLocal Project.”

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