Le Crowdfoutage de gueule !

0

Revue de Web | GMCF | mer. 17 Juillet

Universal Music invente le crowdfoutage de gueule

Photo Chuck_Maurice CC BY.

Universal a-t-il vraiment réfléchi avant de lancer The Vinyl Project, un service de crowdfunding dédié à la réédition de « disques rares ou abandonnés » tirés de son vaste catalogue ?

On ne s’est pas posé cette question lorsque le label britannique Ninja Tune a soutenu (techniquement et financièrement) le site de crowdfunding Beat Delete au début de l’année. Car cela avait nous semble-t-il du sens. Ce site, né dans la tête d’un employé du label électronique, faisait suite à un traumatisme qui reste très présent dans les maisons de disques britanniques : l’incendie de l’entrepôt Sony d’Enfield, au nord de Londres, lors des émeutes d’août 2011. Ce vaste espace stockait notamment les disques du distributeur Pias, c’est-à-dire ceux de nombreux labels indépendants, qui ont vu ce soir-là leur stock partir en fumée. Du jour au lendemain, certains disques datant d’une dizaine d’années sont devenus rares ou introuvables. Dans la foulée, les labels touchés ont continué à exister, mais la réédition de leur catalogue restait un problème, faute de moyens financiers à leur consacrer.

C’est à cela que s’attaquait Beat Delete, qui propose aux internautes d’investir dans la réédition — en vinyle — des disques qu’ils souhaitent. Une fois la somme nécessaire atteinte, les copies sont pressées : c’est du crowdfunding classique et cohérent, et accessoirement l’occasion pour les labels de voir des disques qu’ils avaient eux mêmes oubliés être demandés par les internautes. Dans la foulée, Beat Delete s’est même mis à presser des nouveautés si la demande s’avère suffisante.

The Vinyl Project laisse un tout autre goût dans la bouche. Certes, ladivision vinyles de la plus grosse des majors fait du bon travail lorsqu’elle décide de rééditer un disque de Nick Drake ou un coffret consacré aux premiers albums solo de Scott Walker. Mais c’est son rôle de s’assurer que l’ensemble des disques dont elle détient les droits soient disponibles dans un format qui les honore. Ce qui n’a pas toujours été le cas, que l’on parle d’éditions honteuses en boitier plastique avec un livret qui ne contenait guère plus que la liste des chansons, ou du bizarre rapport d’Universal avec le vinyle.

Ainsi, bien contents de le voir remplacé par le CD plus rentable, les labels du groupe Universal avaient largement abandonné le vieux vinyle depuis le milieu des années 90. Il a fallu attendre 2008, une fois le marché du vinyle bel et bien relancé dans l’esprit des consommateurs et dans les bacs de la Fnac, pour qu’Universal le considère à nouveau comme un format valable et lance sa série de réédition Back to Black, dont la qualité est loin de faire l’unanimité dans les rangs des amateurs. D’autant que ces vieux disques amortis depuis des siècles sont aujourd’hui vendus plus de 20 euros en magasin, la plupart du temps sans le moins bonus ou livret spécialement détaillé.

En parallèle, un ancien de la maison avait profité de ce je-m’en-foutisme pour signer — pour son label Vadim Music — un contrat de licence et rééditer proprement des albums de Gainsbourg comme des disques moins connus signés Michel Legrand ou Philippe Nicaud. L’aventure est aujourd’hui terminée.

Désormais, il faudrait donc aider Universal à faire ce qui est censé être à la base de son existence — savoir quels disques valent le coup sur ses étagères puis financer leur réédition régulière ? On peut totalement comprendre que Ninja Tune fasse appel à son public : ce label est loin d’être le plus pauvre du secteur, mais il ne dispose pas de moyens infinis. En face, Universal est la première maison de disques du monde, qui revendiquait 30% du marché et un chiffre d’affaires en hausse de plus de 4,5 milliards de dollars (3,4 milliards d’euros) en 2012. N’a-telle pas les moyens de rééditer ses disques à ses frais ?

Lire l’article : http://www.ecrans.fr/Universal-Music-invente-le,16710.html

Partager

À propos de l’auteur

“Après un master II entrepreneuriat, c’est en travaillant sur le financement des startups que j’ai découvert le crowdfunding. Passionné par la nouveauté et le web j’ai co-créé Good Morning Crowdfunding pour faire connaître ce marché."

Répondre

logo-gmcf@2X