L’Etat et le crowdfunding pour sauver la culture française #Part2

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Sauver la culture

Dans la première partie de ce dossier, nous avons vu que le Ministère de la culture traverse une crise financière qui n’est pas prête de s’améliorer. L’Etat fait de plus en plus confiance au financement participatif, qui semble répondre à plusieurs problèmes posés par cet état de crise. Mais avant que la solution du crowdfunding ne s’impose, l’Etat a joué un grand rôle dans l’explosion du financement d’entreprises privées (lois de 2003 qui assure une défiscalisation de 60% du montant du don). Le mécénat et les autres formes de financement privé sont devenus la bataille de l’Etat. On assiste à une implication d’importance grandissante d’entreprises privées dans des domaines tels que la culture, les arts, les causes humanitaires et caritatives, le sport et la science. Près d’un tiers des entreprises françaises est engagé dans des actions de mécénat, avec un budget de 1,9 milliard d’euros en 2014.

La motivation des entreprises

Ces activités s’inscrivent dans le cadre de la stratégie globale de l’entreprise : les causes dans lesquelles l’entreprise choisit d’investir sont réfléchies par rapport à l’activité de l’entreprise, son objectif d’image et l’objet de la cause. Elles « achètent » du capital sympathie », ce qui, jusqu’ici était limité. Pouvons-nous y voir une prise de conscience de responsabilité sociale et d’intensification de démarche citoyenne, ou plutôt un intérêt économique lié aux avantages financier, fiscaux et stratégiques ?

Un ralentissement du mécénat

Cependant, les derniers chiffres du mécénat d’entreprise chutent. Le taux de mécénat dans les entreprises est passé de 31% à 21% en 2 ans, pour les entreprises de plus de 20 salariés.(1) En 2014, le budget global du mécénat en France est estimé à 1,8 milliard d’euros contre 1,9 milliard en 2012. Ce n’est pas grand chose comparé à 2008, où l’estimation atteignait 2,5 milliards avant de chuter. Ces dernières années ont été témoins de la baisse des budgets de mécénat et le début de l’année 2014 marque la baisse du nombre d’entreprises mécènes. La raison est simple, les entreprises choisissent les causes en fonction de l’image qu’ils visent et l’engagement auprès de ces causes est plus valorisant à leurs yeux que les projets culturels.

Des limites de pérennité

Des limites au financement privé de la culture prouvent que l’espoir que place l’Etat dans ce mode financement est incertain surtout peu viable à long terme. Les formes d’investissements « cachés » (type placement de produit ou naming) peuvent être assimilées à de la « publicité subliminale », pratique illégale et très controversée. Le frein idéologique reste très présent dans l’opinion publique : les français chérissent leur culture et refusent la « marchandisation » de ce bien précieux. L’aspect monétaire associé aux entreprises privées « vulgarisent » leurs actions pour la culture. L’Etat est soupçonnée de vouloir « instrumentaliser » la culture. Le financement participatif répond encore une fois à ces limites.

Le besoin d’implication du public

Le principal frein au développement de l’investissement privé est le manque d’adhésion du public, premier consommateur de produits culturels. Il y a peu de temps, le fait de commanditer une œuvre ou d’organiser des événements avec une programmation était une activité réservée à une élite. Le début du 21e siècle marque une époque de rupture où chacun peut donner son avis et agir en son nom. Il participe à la promotion d’un artiste qu’il admire et qu’il préfère. De plus en plus d’internautes investissent sur les plateformes de crowdfunding : ils passent de 130 à 320 millions en France entre 2011 et 2012, puis de 320 à 651 millions de 2012 à 2013.

Fleur Pellerin, ministre de l’économie numérique : « Les Français veulent être acteurs de la société de l’économie. L’explosion du « participatif » dans tous les segments de la société illustre bien cette dynamique qui transforme la consommation, la production, l’organisation de nos entreprises et la manière d’associer les citoyens.  Cette lame de fond traduit un changement de culture : chaque citoyen veut s’engager aux côtés des projets auxquels il adhère, qu’il soutient avec son épargne et avec ses convictions. »

Le crowdfunding supprime des risques en culture

Toutes les réponses aux problèmes soulevés par le domaine de la culture sont réunies dans le financement participatif. Ce système libère les projets d’intermédiaires jusqu’ici omniprésents. Certaines complications liées à ces intermédiaires disparaissent : les banques (demandent des garanties trop solides), les mécènes (conditions trop rigides) et les collectivités (démarches compliquées et subventions en retard). Le crowdfunding est garant de transparence quant à l’attribution des fonds levés, c’est un des éléments qui donne le plus confiances à ceux qui se lancent dans le financement participatif.

Un futur encourageant

De nouvelles plateformes apparaissent et choisissent la différenciation, en se plaçant sur des secteurs de niche. Les domaines sont variés : jeux vidéos, art enregistré, arts vivants, immobilier, nourriture et boissons, mode, journalisme… Mais la majorité des plateformes de spécialisation sont axées sur des produits culturels.

Les possibilités d’évolution sont très larges. Si, en effet, l’avènement collaborative a fait peur aux acteurs « historiques » de l’économie française (concurrence déloyale) et a semé une ambiance de doute, de tension et de désordre, les institutions et grandes entreprises se mobilisent aujourd’hui pour faire partie de la révolution.(2)

Sources :

(1) Baromètre bisanuel de l’Admical du 27/03/2014.

(2) Le Monde, « L’économie collaborative s’invente en France : gardons notre avance », 06/03/2014

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À propos de l’auteur

“Après une école de commerce avec des stages dans les milieux de l’art, de la musique et de la communication, je me suis tournée vers un MBA en Ingénierie culturelle et médiation. Globe trotteuse dans l’âme, je ne tiens pas vraiment en place et suis toujours à la recherche de nouveaux mondes, de nouvelles perspectives et de nouveaux challenges. Diplômée depuis cette année, je travaille chez My Social Event, une plateforme créée par deux amis, en tant que RP.”

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